Plantes médicinales à travers l’histoire

Les plantes en usage chez divers peuples d’Europe : comment se soignait-on à l’époque des Romains, des Grecs, des Celtes ou des germains ? Focus de plantes de traditions dont certaines sont encore utilisées de nos jours.

combattant
À l’aube de la bataille le guerrier est en forme mais de quoi seront faits ses soins en cas de coups et blessures ?

Prévention

Cet article est à vocation culturelle et n’incite nullement à la consommation de plantes. Il est en effet risqué de s’y aventurer de par la complexité du domaine. De nombreuses plantes à vertus intéressantes peuvent devenir toxiques si elles sont mal préparées, consommé, identifiées ou si l’on utilise la mauvaise partie. Néanmoins si le sujet vous intéresse, faites-vous accompagner par un spécialiste de la question et restez prudent et informé sur les expériences que vous souhaiteriez tenter.

L’usage des plantes depuis la préhistoire

L’usage de plantes pour se soigner est probablement antérieur aux premiers hommes puisque nous observons des comportements d’automédications chez certains mammifères dont les chimpanzés et bonobos avec qui nous partageons la majeure partie de notre système génétique. Il semble que les premières preuves tangibles de ces usages attribués à l’homme remontent à 370 000 ans chez une population d’Homo erectus du Proche-Orient. Plus proche de nous la momie de l’homme d’Otzi qui a été retrouvé dans les alpes italiennes et qui a bénéficié d’un état de conservation rare bien que sa datation remonte au néolithique final (26 00 ans av. J-C), nous a légué un petit sac de pharmacie qui contenait des plantes médicinales.

Quant aux premières documentations, nous les retrouvons chez les Sumériens, les Égyptiens et les Indiens. On nous parle de la sauge, du saule et de la myrrhe ou encore de l’aloé parmi les traitements adaptés à certaines pathologies.

tablette sumerienne
Tablette sumérienne
sauge officinale
Sauge officinale, l’une des premières médicinale documentée

L’Antiquité et début du Moyen Âge

L’antiquité laissera une place de choix à la médecine par les plantes. Il sera par ailleurs déjà reconnu très tôt dans l’histoire les liens entre la consommation de plantes aromatiques et les bienfaits sur la santé, on va également associer certaines plantes à certaines divinités et la connaissance de certaines drogues va entourer les spécialistes des plantes d’une aura de mysticisme. Les guerres et le mode de vie rude de l’époque à d’ailleurs déjà dessiner une vaste connaissance des plantes utiles en cas d’arthrose, contusions, blessures, inflammations, etc. Les travaux de Pline l’ancien (23-79) ou de Galien (129-201) rapporte près de 500 espèces de plantes connues pour leurs utilisations médicinales. Quant aux gladiateurs, que l’on imagine sûrement engloutir les morceaux de viandes par kilos, ils s’avèrent qu’ils étaient principalement végétariens. Leurs repas avaient une base d’orge, complété de plantes médicinales et d’une boisson à base de cendres végétales qui semble avoir été usitée comme complément de calcium et magnésium de l’époque. Plus tard Charlemagne éditera un capitulaire (capitularia vilis) désignant 88 plantes (exemple ail, fenugrec, livèche, estragon, etc.) faciles à cultiver et utiles au quotidien à l’attention de ses seigneurs vassaux. Les croisades permettront également de découvrir de nouvelles plantes avec de nouvelles vertus comme le chanvre ou les échalotes.

Asclepios
Asclepios le dieu médecin des Grecs anciens à ,donné son nom aux Asclepias, un genre botanique dont plusieurs représentants possèdent des vertus médicinales.

Quelques plantes de l’antiquité romaine en exemples

  • La lavande (lavandula angustifolia) : Employée pour les parfums, elle est également reconnue comme désinfectant et anti-inflammatoire. Son nom viendrait d’ailleurs du latin “Lavare” et qui nous a donné le verbe “laver”. Massivement cultivé en Gaule celtique, c’était un produit de choix pour les femmes de la république romaine.
  • le marrube blanc (Marrubium vulgare) : Faisant partie des “plantes oubliées “, elle fut employée contre la toux a tel point que le produit avait sa réputation dans toute la Méditerranée antique. Il fut associé au dieu faucon Horus dans l’Egypte ancienne.
  • le coquelicot (Papaver rhoeas) : Les pétales et les graines étaient utilisés en sédatifs et somnifères ainsi que pour faciliter la respiration et la digestion.
  • L’armoise vulgaire (Artémisia vulgaris) : Digestive, vermifuge et antipyrétique. Une tradition rapporte son usage chez les légionnaires romains qui enduisaient leurs sandales de feuilles d’armoise pour éviter la fatigue des pieds.
  • L’ortie dioïque (Urtica dioica) : Plante associée au dieu Thor chez les Scandinaves, elle était censée protéger de la foudre et avait la réputation d’éloigner les maladies chez de nombreux peuples d’après le naturaliste Pline l’Ancien (23-79 apr J-C).
  • La menthe (mentha sp) : Les diverses espèces de menthes furent utilisées par de nombreux peuples pour faciliter la digestion, soigner l’haleine, augmenter la capacité respiratoire, soigner les maux de têtes, etc. Ses qualités gustatives et parfumées furent également largement appréciées à tel point que l’origine de son nom semble remonter à la préhistoire. La légende raconte qu’elle fut une nymphe transformée en plante par la déesse Perséphone, car elle était l’ancienne amante de son mari Hadès, dieu des enfers.
  • Le rosier canin ou églantier (Rosa canina) : La chair de ses fruits, riche en vitamine C semble avoir été confite et mélangé à du miel pour créer des fortifiants chez les peuples du nord (celtes, germains, scandinaves, etc.).
  • La sauge (Salvia officinalis ): Fébrifuge et antiseptique, utilisé également pour blanchir les dents et soulager les règles douloureuses. Elle aurait été la nourriture de la chèvre Amalthée dont le lait aurait nourri Zeus quand il était enfant. Ce lait bénéficiant des vertus de la sauge aurait garanti une grande force au dieu de l’Olympe. Le nom de sauge vient du latin “Salvus” qui à donner le mot “sauver” en français.
  • La camomille romaine (Chamaemelum nobile) : Elle fut utilisée pour faciliter la digestion et l’endormissement. On soignait également les infections cutanées et oculaires avec des décoctions de camomilles.
  • Le calament (Calamintha officinalis) : stimulant, digestif et mucolytique.
  • L’hysope (Hysopa officinalis) : Plante sacrée chez les Phéniciens, tonifiante, carminative, digestive, désinfectante.
  • La consoude officinale (Symphytum officinalis) : Du latin “Consolidare”, reconnue pour ses vertus cicatrisantes et anti-inflammatoires.
fruits d’eglantier
fruits d’églantier

Ésotérisme et mysticisme

Outre les propriétés hallucinogènes, stimulantes ou analgésiques de certaines plantes (pavots, mandragore, etc.). Les religions, le chamanisme et la sorcellerie entretiendront un culte particulier à l’usage des plantes en les associant à des rites initiatiques ou à des divinités, ainsi qu’à des statuts tels que le Berserker (guerrier-ours) ou le Ulfhednar (guerrier-loup) chez les Scandinaves dont certaines théories associent l’existence de ces fonctions aux usages de la jusquiame noire ou du champignon l’amanite tue-mouche. Ces dérives et l’apparition du christianisme seront entre autres à l’origine des concepts postérieurs de magie noire et de magie blanche.

jusquiame noire
Jusquiame noire

plaques de Torlunsda
Une des plaques de Torlunsda (âge du fer germanique) représentant Odin et un Berserker par Knut Stjerna (1874-1909)

Fin du Moyen Âge et renaissance

La chute de Constantinople (1 453) provoque une évasion des érudits de l’époque vers les contrées occidentales, emportant ainsi avec eux un savoir hérité des cultures romaines, byzantines et arabes qui va diversifier les connaissances sur la pharmacopée botanique. La période des grandes découvertes avec l’établissement de nouvelles routes commerciales et de nouveaux comptoirs en Asie, Afrique et Amérique nouvellement découverte va également enrichir les connaissances sur le sujet des plantes médicinales. À certaines périodes interviendra également la théorie des signatures, selon laquelle tout être vivant est au service de l’homme et chacun de ces êtres dispose d’une signature divine indiquant son aptitude. Cette théorie intervient dans le fait de lutter contre la sorcellerie qui use à tort et à travers de sciences divulguées par le diable au profit des sorciers.

Exemples de plantes reprises dans la théorie des signatures :

  • La Pulmonaire (pulmonaria officinalis) : Ses tâches qui ressemblent aux alvéoles pulmonaires étaient censées indiquer ses actions bienfaitrices au niveau des poumons.
  • la sagitaire (sagitaria sagitilifolia) : À cause de ses feuilles en forme de flèches auraient eu des propriétés pour cicatriser les blessures provoquer par les archers et arbalétriers.
  • La chélidoine (Chelidonium majus) : Utilisée dans le traitement des ictères à cause de la couleur de son latex, elle présentait néanmoins des défauts de toxicité.
Chelidoine en fleurs
Chélidoine en fleurs

Les plantes médicinales à notre époque

À notre époque, il est encore courant de se soigner ou de compléter sa médication avec des plantes médicinales. Diverses disciplines et boutiques proposent leurs services et savoir afin de parfaire votre santé. Au niveau de la recherche, la discipline de l’ethnobotanique qui étudie les plantes ayant eu une relation étroite avec l’homme sert à de nombreux instituts qui travaillent encore à l’identification de molécules naturelles en vue de créer de nouveaux remèdes. Il existe quelques exemples phares que nous pouvons vous citer :

  • L’Occimum gratissimum Une plante proche de notre basilic et qui est actuellement retenue comme candidate pour l’élaboration d’un remède contre le Sars-cov-2 responsable de la pandémie de covid 19.
  • L’Artemisia annua : Elle contient plusieurs principes actifs antiviraux et bactéricides qui sont toujours en cours d’études. Elle pourrait également être à l’origine de nouveaux traitements contre le cancer.
  • Le Podophylum peltatum et la Catharanthus roseus dont on vient de synthétiser plusieurs molécules actives contre le cancer et certaines maladies dégénératives.
  • Le Taxus baccata (if européen) est également à l’étude dans des programmes de recherches contre le cancer.
Occimum gratissimum
Occimum gratissimum Par Forest & Kim Starr,

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